Par Charlie Lecach – photos Laurent Scavone
On aimerait bien pouvoir vous annoncer que ce superbe Knuckle “sorti de grange“ a appartenu à un célèbre membre des 13 Rebels. Ou qu’il a assisté à l’une ou l’autre des “émeutes” californiennes ayant signé l’acte de naissance du mouvement biker. On ne peut hélas rien affirmer, de même qu’on ne peut rien infirmer à ce sujet…
Rencontré à Pismo Beach lors du “TROG West”, Steve Brindmore est un gars qui cache bien son jeu. Sous ses airs de hipster tatoué au rouleau, il est en fait un chef d’entreprise qui travaille depuis trente ans avec les plus grands musées et collectionneurs d’art. Basée à San Francisco, sa société “Case Fine Art Crating”
se charge de fabriquer des caisses très spécifiques pour l’expédition nationale et internationale d’œuvres souvent uniques et inestimables. Lors des derniers contacts que nous avons eu avec lui juste avant de boucler ce numéro, il nous annonçait d’ailleurs qu’il venait de terminer une caisse faite sur mesure pour le transport du Panhead original utilisé par Fonda dans “Easy Rider”. Il est donc clair que Steve est un amateur de belles choses peu importe qu’elles soient du genre à être exposées dans des galeries ou à écumer les routes. Il roule ainsi au guidon d’un café racer Norton des plus authentiques, lorsqu’il ne se met pas en selle sur son FL Knucklehead ’47. Une machine qu’il a achetée sur Craigslist / Venice Beach lors d’un voyage à Los Angeles, sans avoir cependant plus de détails sur son pédigrée.
Il sait juste qu’elle a été remise en route en 2013 chez Kiyo’s Garage, pour un célèbre producteur hollywoodien à qui l’on doit notamment la série “Sons of Anarchy”. « Je pense qu’il en avait marre d’éponger les flaques d’huile sur le sol du studio », nous balance-t-il en rigolant, ne se souciant visiblement pas vraiment du passé de sa moto, mais plutôt de son présent. Et la bonne nouvelle, c’est qu’il s’annonce radieux. Car malgré l’état de décrépitude apparent de cette Harley, son bloc 1200 cc est du genre à démarrer au quart de tour.
On remarque d’ailleurs que le faisceau électrique a été proprement refait en fil toilé neuf, avec cosses soudées et isolées de bande thermo-rétractable. De même qu’on note la présence d’une dynamo avec régulateur moderne intégré, d’un robinet et d’un filtre à essence neufs, d’une bobine actuelle imitant le look de l’originale ou de repros Coker de pneus Beck 1940’s. Les copies de pièces anciennes sont cependant très minoritaires par rapport à l’authentique accessoire vintage, comme en témoignent les risers, accessoires H-D de 1949 permettant de changer à loisir de guidon sur sa fourche Springer. Ou encore le rare système de sélecteur à pied “B&H Foot Shift” sur la gauche, au-dessus d’un des deux marchepieds rectangulaires de type 1916-1939. La grille de vitesse du réservoir est donc dépourvue de son levier manuel, mais elle reste quand même en place pour décorer. Au même titre que les sigles “Speed Ball” dessinés par le designer industriel Brooks Stevens et dont les copies sont loin d’être aussi belles que ces originaux. Une généralité qu’on peut d’ailleurs affirmer au sujet des bobbers dans leur ensemble. Autant un chopper peut mériter de briller de mille feux sous une cascade de chromes et de paillettes, autant un tel “bob job” est mis en valeur lorsqu’il affiche une vénérable patine, qui nous incite à imaginer son passé folklorique. De préférence dans un petit village californien et dans les mains d’un bad boy des fifties !