Une Romance Franco-Américaine.
Article et photos : Laurent Scavone
Je descends appeler Sally par téléphone, c’est la bonne qui répond, puis son père et enfin Sally au bout du fil. là je lui demande comment elle va, elle me raconte sa semaine à Berkeley en attendant que son père s’éloigne, je ne suis pas très fréquentable; « Tout sauf Holden Scofield » s’était exclamé son père devant toute la famille Kingsley attablée et endimanchée. La Mome Sally chuchote « passe me prendre dans une heure à l’angle de Percy et Washington, vient avec « Dust Cheaker » !
Dust Cheaker ronronne comme une chatte sous un palmier, j’apperçois Sally Kingsley qui presse le pas avec grâce vers la calandre rouillée du radiateur, je balance ma clope, elle entre comme une gazelle dans mon Hot Rod, m’enlasse et en levant les bras vers le ciel elle balance « Fonce Holden, Fonce ! », je mets plein gaz vers Pismo Beach où nous attendent les gars. Depuis la fin de la guerre en Europe, c’est ici que nous nous retrouvons, sur la plage de Pismo beach Californie. On y retrouve la bande de Grover beach, la bande des Oilers, et celle des black Cats. Ici s’alignent motos et hot Rods pour des courses sur 200 m, ici on retrouve les sensations et les frissons d’un autre combat, nous étions Marty et moi à Sword beach Ouistreham pour le débarquement en juin 1944, dans la furie des balles. Prêt de deux ans plus tard sous le soleil de Californie, je mets full gaz, sans Marty, il me reste la fureur sans le sang, j’ai besoin de vitesse, j’ai envie de Sally !
Samedi 21 septembre 2019, sur Sword Beach à Ouistreham en basse Normandie (France) c’était la Californie, c’était Pismo Beach. Dans un décor minimaliste sans sponsors, sans Redbull, sans les oriflammes des constructeurs automobiles ou marques de motos criardes nous étions projetés dans une époque que personne n’a connu ici. Pourtant ce décor de cinéma américain est le quotidien de passionnés qui on choisi les années 40 et 50 comme mode de vie. Sur ce sable fin qui fut le théâtre d’affrontements sanglants en 1944 s’affrontent aujourd’hui un plateau extraordinaire de hot Rods et de motos d’avant 1947. Tous les participants sont passés au contrôle technique sélectionnés avec soin et précision par le crew du Normandy Beach race. Cerise sur le pancake, les 5000 visiteurs ont pu voir rouler une Belly Tank, une voiture improbable préparée autour d’un réservoir d’avion de la Seconde Guerre mondiale ou cette iconoclaste voiture à hélices… Qui tourne aussi vite qu’un motoculteur sous acide.
J’étais présent quand tout a commencé !
En 2016 j’avais accompagné les futurs organisateurs de cet événement en Californie, la bande de copains qui venait faire courir leurs Harley et Indian à Pismo Beach sur la manche pacifique du TROG (The race of Gentlemen). C’est sur cette plage californienne, de nuit à l’arrière d’une villa louée pour la circonstance que l’idée a germé. Un verre de rouge Français, of course ! autour du brasero Jean-Marc, Marc, Thomas, Fred, Laurent rêvèrent d’une course en France. Là dans la nuit américaine, aux sons des vagues du pacifique, des Hot Rods et des campings car roulent encore sur le sable où certains s’enlisent, vous vous dites que tout est possible, surtout après avoir bu plus que d’habitude du Bordeaux !
Les différentes éditions du TROG on donné lieu à des images et des vidéos sublimes qui firent le tour du monde sacrant cet événement comme « La mecque » mondiale des courses vintage sur sable. On ne vient pas que pour courir, on vient aussi pour vivre une expérience, pour remonter le temps. Les engins sont d’époque, les vêtements, les caravanes, la signalétique, la communication, les stands tout respire les années 40 surtout le public. Imaginez-vous, une ville investie par des hot Rods, des motos d’époque, des muscles cars, une ville décor de cinéma, un rêve pour photographes et vidéastes, un rêve pour les yeux…. Un rêve pour la team française qui depuis parcourt le monde pour revivre cette expérience. Le Danemark avec Romo, l’Angleterre avec Pendine Sands, les USA avec la cession du New Jersey du TROG, alimenter son rêve, prendre les contacts nécessaires, apprendre en vibrant.
Pourquoi faire différent, faisons pareil !
Cette course est un miracle dans une époque aseptisée ou tout ce qui a un rapport avec la mécanique est considéré comme un cancer, alors organiser des runs avec les « vieux machins » qui crachent de la fumée comme des cigarettes électroniques sur une plage est aujourd’hui un tour de force et pourtant cet événement existe et sera renouvelé l ‘année prochaine. Marc Felix, Thomas Hervé, Jean-marc Lazzari ont pesé de tout leurs poids pour faire naître cette course conforme au TROG, idem aux standards d’époque pour nous faire vivre à l’instar du Dust Cheaker, les runs où s’affrontaient une majorité de Fords type A avec le 4 cylindres en ligne ou type B équipées de V8 entre 85 et 120 cv.
A Ouistreham on n’oublie pas l’Amérique !
Depuis le débarquement l’ADN des USA coule dans les vaines d’une région qui n’oublie pas son histoire, c’est peut-être ça le secret, mais mettons de côté toutes ses considérations et revenons sur la plage, le Hot Rod d’Holden Scofield a traversé les âges pour régaler nos yeux. Il n’est pas le seul puisque plus de 80 équipages autos/motos sont inscrits venant de toute l’Europe et même des USA.
il fallait bien ça pour réunir un plateau aussi beau. Fan d’Harley ouvrez les oreilles, des Harleys WLA fabriquées pour les besoins militaires sont à l’honneur, selle monoplace, moteur 740cc, commandes suicides…. Des motos de 15 000 à 30 000 euros qui mangent de la poussière ou cette incroyable Indian Chief de 1942 dans sa livrée grena rutilante qui a enchainé toute la journée des runs sans faiblir. Il y a celles qui courent et celles qui se baladent en ville ou sur la digue comme des bimbos en bikinis, on y trouve aussi d’autres voitures non conformes aux critères de course, des muscle cars, des voitures françaises d’après guerre ou des VW des années 50 à 70, bref toute la communauté custom culture autos et motos. On pouvait même croiser face à la plage ou au camping, des Velocettes, des BSA, AJS, Peugeot … et finalement à part ça rien d’autres et franchement c’était bien un évènement light, qui propose l’essentiel, vous avez envie de vous faire coiffer ou tatouer vous toutes les fois où vous mettez les pieds dans un événement ?, Moi non ! Tester les dernières sorties motos, je peux le faire chez le concessionnaire, acheter des fringues idem, car les événements motos pullulent et les sponsors sont plus souvent à l’honneur que les engins que l’on rêve tous de toucher du regard… Au Normandy Beach Race, on pose son cul sur le sable, l’azur est un fond d’écran qui voit défiler de 10h à 17H30 des engins que l’on voit quasiment jamais. Ici les pilotes se foutent d’abimer leurs engins, une équipe suisse est même venue en roulant et compte bien repartir sans remorque en Ford 32.
- Les mots qu’ils faut absolument savoir pour avoir l’air cool dans les paddocks !
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- On ne dit pas Harley Davidson monoplace d’avant 1946, on dit simplement WLA
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- On ne dit pas la fille au drapeau à damiers, on dit « Flag girl »
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- On ne dit pas Ford A moteur V8 avant 1949, on dit Flathead
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- On ne dit pas Voiture ou moto d’origine, on dit Street legal