La Hollande l’autre pays du Flat Track !

:::::::::::::::::::::::::: Article et photos : Laurent Scavone ::::::::::::::::::::::::::

9h00 du matin à Lelystad (Hollande), les pilotes immergent de leur van, froissés par une nuit trop courte et froide. Au cul des transporteurs ouverts, dégueulent des hommes, des motos, des fringues, des équipements. Le ciel est menaçant, la mer du Nord à quelques centaines de mètres apporte des embruns et des nuages aussi sombres que la terre fertile hollandaise de celle qui fait pousser les tulipes rouges. Le rouge c’est aussi la couleur du circuit qui s’impatiente de voir tourner ces pilotes venus de toute l’Europe sans récompense. Ici on gagne le respect et la reconnaissance, rien d’autre et franchement dans un monde où la tune a pris le pouvoir ça fait du bien !

On se traine jusqu’à la buvette pour un petit déjeuner alors que les premières motos s’engagent déjà sur la piste à peine damée par le tracteur. On trépigne, il fait frais, les français sont là, je les vois tous, la terrasse de la buvette surplombe le Speedway ! Pour des gens qui n’ont rien à gagner, le chemin est long jusqu’en Hollande à une cinquantaine de kilomètres au nord d’Amsterdam et pourtant ils sont là car les occasions de rouler sont rares, comme les occasions d’être ensemble et de partager une passion qui peut paraitre ridicule… Tourner en rond ! Tourner à gauche.

De là où je suis, je vois l’équipe de Toulouse, Christophe Canitrot (Organisateur des courses motos du Wheels and Waves) avec sa Triumph, Régis Guyot avec sa Rickman à moteur BSA, leurs épouses les accompagnent. L’équipe de Chartres avec Frank Chatokhine aux couleurs officielles de Ducati que l’on ne présente plus, sa compagne Zoé sur Rickman métisse, Rénia en BSA qui travaille à l’atelier avec Frank, le couple Decombard Christophe qui reprenait la discipline après une chute terrible en 2018 en Angleterre et sa femme Laurence sur une Suzuki 650 DR. L’équipe de Paris avec le pionnier de la discipline, Dimitri Coste sur une mini Bike Daytona et sa Triumph et enfin Hubert Bastie avec une Husqvarna.

Je pourrais vous commenter les courses qui se succèdaient aux rythmes de 10 sessions par heure, vous vanter le pilotage des uns et la fougue des autres, vous expliquer comment tourne une moto ou même vous donner quelques tuyaux pour mieux glisser glaner sur toutes les pistes d’Europe. Vous dire combien j’ai kiffé certaines motos en first place ou au cul des perdants, vous dire aussi que les saucisses étaient bonnes mais je vous parlerai plutôt de deux choses, l’élégance des français, communicative et l’âme d’enfant des pilotes.

Parlons d’élégance à la française : Les pilotes français ont ce truc à part, c’est vrai et n’en déplaise aux plus grincheux d’entre vous, le style c’est important ! Pourquoi foutre en l’air le truc surtout quand vous roulez avec une moto ancienne d’une pure beauté qui selon moi doit être rehaussée par une tenue adéquate. Ça ne veut pas dire rouler en slip, ça veut dire simplement que les français respectent les dates de naissance de leur moto ! Ça veut dire mettre un pantalon de cuir d’époque qui ne jure pas avec une Triumph des années 70, ça veut dire porter un jersey de course qui ne vient pas polluer visuellement le soin apporté à restaurer des motos où le plastique n’a pas droit de cité… Et ça c’est cool ! C’est tellement cool que les photographes se régalent, ils ne sont pas les seuls, les spectateurs adorent et pour ne rien cacher j’ai remarqué un changement depuis 5 ans chez tous les participants en dehors de nos frontières, ils suivent et ça rend ces évènements particuliers car ils nous propulsent dans un autre temps.

Je vous assure que ça modifie beaucoup de choses, il y a une décontraction qui vous renvoie aux années où le sport était une affaire d’homme libre, libre de boire une bière entre chaque course, libre d’aider ses concurrents lors d’une panne, libre de fumer une clope et d’accepter de partager ses expériences.

L’âme d’enfant des pilotes : Vous avez déjà vu des yeux briller, des corps qui trépignent d’impatience, l’estomac qui se noue et qui se voit, le stress qui grimpe et cette joie qui se lit dans les yeux des gagnants et des perdants et ce sentiment d’être un instant le roi du monde la course terminée, j’ai vu ça à Lelystad, j’ai vu tous ces sentiments grâce à la moto, grâce à une piste de terre.Dans le regard de Christophe Canitrot, dans l’euphorie de Régis même chez Dimitri Coste que l’on pourrait croire blasé… Ben il n’en ai rien, c’est juste ce truc qu’on les hommes qui ont gardé leur âme d’enfant.